Ce recueil retrace les errances et les découvertes du peintre, ses interrogations face à la montagne noire, aux feux ocres des émeutes où s’éclairent et se réchauffent les traits bleus du nouveau monde.
Le peintre et le poète passant ainsi d’une amitié à l’autre comme les fleuves d’encre échoués sur la page du cahier. Ils inscrivent les visages brouillons des émeutiers sur les pentes vertigineuses où ils prennent leur élan vers la source vive de la poésie. Le Bleu des émeutiers est ainsi le lieu d’une rencontre avec la poésie incandescente du peintre Jacques Le Scanff.
Une lithographie réalisée par Philippe Moreau et qui accompagne le tirage de tête de son recueil est disponible sur commande ou à l’atelier du peintre.
DOSSIER DE PRESSE
Le Bleu des émeutiers
Notes de lecture
L’action de vivre, ou le peindre-écrire de Jacques le Scanff
Les éditions Quiero et Samuel Autexier publient un livre de poèmes et d’encres de Jacques le Scanff, à Forcalquier, là où l’artiste ne se lasse pas de regarder et de peindre la montagne de Lure.
C’est un livre où poèmes et encres se répondent comme dans un cahier de notes où la main passerait de l’un à l’autre, de l’ écriture au dessin.
Il commence par ce que j’appellerai une image muette ou un film sans son, un personnage en mouvement, privé de parole et de son, un Il posé sur une toile de fond :
Il court des pays /
Ailleurs /
il regarde /
La langue lui est ferméeLes murs et les vêtements /
amples et blancs /
L’ombre : un cadre bleu
On songe à un Il projeté de photographe, à l’extérieur de lui-même. Dans le paysage.
Ce lien d’un personnage et d’un paysage ne va pas sans faire penser à une photographie, et à ce personnage de la photographie qu’on voit et qu’on entend pas.
Soudain le photographe est dans l’image, pas extérieur.
Il aime.
Il regarde.
Il aime des gens dans leur langage, leurs gestes, leur présence, et un peu, beaucoup, au delà des mots.
dans le bus les corps se pressent /
et ensemble s’élèvent, comme un ballet /
puis se couchent aux virages, /
une gigue grave et grotesque
Il aperçoit la division du monde, à l’extérieur, (des Pays) et à l’intérieur de lui même :
la langue lui est fermée
Fermé, mot à double sens, la langue des pays courus mais aussi sa propre langue.
Ne pas parler, ne pas comprendre la langue du pays aiderait à voir.
Il regarde avec une telle force /
Que ses yeux saignent
Il regarde les êtres dans leur paysage dont il ne les sépare pas, il va, il est, avec eux dans le Grand Fonds.
Ceux qu’on croit muets (mais qui regardent), sont les vrais acteurs et les dépositaires de la parole. Ce sont les Émeutiers.
Leur parole est geste, vêtement, sourire, communication silencieuse. Révolte. Voix rauques.
On ne saurait empêcher qu’ils/elles pensent.
Femmes que j’imagine dans ces pays où leur voile est bleu, dont le regard parvient :
Il marche pour oublier /
des femmes /
Aux yeux qui s’évadent sous les cils
Ici le bleu serait la couleur intéressante à scruter. Comme le bleu du travail par exemple. J’ai soudain pensé à Mallarmé qui regardait les terrassiers, ces ouvriers qui travaillent dehors, et se bouleversait à la vue de leurs outils et de leurs corps :
« ils dressent au repos dans une tranchée la rayure bleu et blanc transversale de leurs maillots »*
Un poème intitulé « le voyage du sourd », se réfère à l’absence du son de la parole qui hante ce livre, et en constitue la Vision dans le « Bleu des émeutiers » : l’image disant ce qui manque à la parole.
C’est Goya, le peintre et son angoisse, car il savait bien quel lien l’unissait à son peuple espagnol -privé de tout- et souffrait de cette double perte par la surdité, de la langue de ceux-là.
Mais le peintre n’a pas le droit de mourir, ni l’auteur de ce livre, de s’arrêter de graver ou d’écrire, car alors c’est en lui que les morts et les muets de l’histoire trouveraient leur fin.
les morts vont mourir de ma fin ?
Pourquoi cette écriture double, ce peindre-écrire ?
L’humain, forme et apparence, fait signe et lien, parmi les choses.
L’ombre humaine ne dessine pas seulement sa figure au sol ou sur un mur, elle fait surgir le fond muet, la toile de fond. Glose de montagnes, rectangles, soulèvements bruns, menace de la croûte terrestre, fragments d’un corps qui ne se livre jamais entier, qu’on ne peut maîtriser. Une insurrection. La Nature, c’est nous, elle tend vers la lumière, la matière est mouvement, désir, c’est une expérience de changement.
La parole humaine, l’écriture, la peinture sont des probabilités de ce que nous appelons « Nature », à tort, pour l’opposer à la culture.
Ce sont les Émeutiers de la Vie, et leur vision nous emporte dans l’action de vivre -geste pasolinien-, le peindre-écrire de Jacques le Scanff.
Il fait le rêve d’exprimer, qui ne préexiste pas à ce qu’on voit, né avec le premier regard du nourrisson peut-être, et qui est la singularité de l’artiste.
Il rêve de rues romaines, d’ombres gravées /
les traits de burin si proches /
qu’ils se confondent à la nuit /
à ses pluies de pointes.
Geneviève Huttin
* Stéphane Mallarmé, Variations sur un sujet.
Jacques le Scanff, Le Bleu des émeutiers, Editions Marginales-Quiero, Les Billardes, 04300 Forcalquier, 20€
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Le Bleu des émeutiers - Jacques Le Scanff
Mon coup de cœur se porte aujourd’hui sur un livre édité à Forcalquier :
Le Bleu des émeutiers de Jacques Le Scanff, éditions Quiero dirigée par Samuel Autexier, au prix de 20 euros.
Ce livre composé en typographie met en scène des gravures et des peintures “rupestres” de Jacques Le Scanff accompagnées de textes poétiques du même auteur ancrés dans une atmosphère brute et chaude. Le style simple déploie une mélodie très pure, la poésie heurte la prose avec subtilité et deux personnages en émergent, sortes de rêves en suspension dont les prénoms nous sont donnés comme par mégarde. Mathieu et Esther incarnent ici l’essence d’un passage ou celui d’un amour, peut-être aussi ne sont-il que l’appel de l’un vers l’autre ou la musique de l’un sans l’autre.
Mathieu déambule, se frotte aux lumières, aux absences, aux béances, mais aussi des petits paragraphes courts encadrent des pensées plus serrées :
Tuer dans le feu /
l’orgueil, le désir de plier les corps /
pour obtenir le salut grotesque /
que consent l’humilité.
Esther apparaît comme un double, une silhouette qu’on suivrait de loin et qui culmine jusqu’au seuil fragile du doute :
Elle n’a pas dit qu’elle refuse /
elle n’a rien dit, /
ne laissant au doute /
que la croûte du fard.
Ce livre rare enchante et surprend par son aspect, la qualité du papier, de la composition, de l’encre, la finition, il existe aussi en tirage de tête au coût de 120 euros.
Sadou Czapka
La librairie Regain est une librairie associative, généraliste et spécialisée. La poésie y est centrale, la librairie organise chaque année un festival de poésie “Un Regain de poésie” qui rassemble des poètes contemporains et des éditeurs. Moi même autrice en poésie je m’attache à garder vivante cette voix du poème qui rassemble une littérature sans fards ni conventions, guidée par le chant du vivant, et qui tend à faire entendre un monde plus sensible. Ci-dessous un lien vers notre site internet de vente ligne, le rayon poésie y est particulièrement valorisé.
Site internet : https://www.librairie-regain.fr/.
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